Il faisait si froid, mais la vue était magnifique là-haut. Le soleil se levait à sa gauche. Il avait réussi l’impensable ! C’était le dernier sommet pour lui, le mont Couronné, en solitaire. Comme par tradition, il y planta son drapeau, cet emblème sombre censé reprendre les armoiries de sa famille.  

Que de chemin parcouru depuis l’enfance qui l'avait finalement presque ramené à son point de départ. Sous le manteau nuageux, il pouvait deviner Frimapic, se remémorant alors qu’il regardait déjà vers le ciel et ce sommet si lointain et empli de mysticisme.  

Henry était né dans le froid, avec cette bougeotte caractéristique des enfants émerveillés par la nature. Ça n’avait pas pris longtemps pour, qu’à l’adolescence, il plie bagage avec certains de ses amis pour vivre une vie d’aventure, de mouvement et de rencontre aux sommets.  

Reconnu comme l’un de meilleurs alpinistes de sa génération, le garçon avalait avec une véloce précocité les différents sommets. Faisant partie d’équipes traçant de nouvelles voies de grimpée sur certains des sommets les plus abruptes du globe. Son nom était parfois évoqué et utilisé pour baptiser certains de ces parcours.  

Avec cette petite notoriété, il était retourné une première fois à Frimapic, y trouvant l’amour de sa femme Margareth et donnant naissance à une petite fille. Il était heureux, regardant souvent vers cette montagne perçant les nuages, son regard se perdant au loin. Il revenait à la réalité en rigolant, faisant sauter sa fille sur ces genoux.  

Mais, comme tout aventurier qu’il était, il lui restait quelque chose à accomplir. Il était resté à l’affut, cherchant comme toujours à être le premier à voir par de nouveaux points de vue, de nouveaux horizons. Netovia...  Cette dernière épreuve, pour boucler la boucle. Alors il s’était remobilisé et repréparé, on lui disait que c’était de la folie, que c’était dangereux, mais l’appel était trop fort.  

Alors, il avait embrassé sa femme et sa fille, jurant de revenir vite. Il embarquant pour l’île sauvage qui voyait sa popularité grimper doucement, ils devaient bientôt y installer une Ligue Pokémon. Beaucoup d’explorateurs viendraient à ce moment, et il comptait bien que ceux-ci découvrent son drapeau avant de voir par eux-mêmes les beautés du Nord.  

Il était fier quand il débarqua, sortant son Galegon pour commencer à charger son paquetage au pied du glacier de Vivegal. Il l'avait capturé lors de sa dernière expédition et elle était avec lui quasiment depuis qu’il était revenu à sa vie sédentaire, appréciant de jouer avec sa fille. Ils commencèrent à marcher, sans savoir que les nuages à l’horizon pourraient être leur tombeau.  

On retrouva son journal des mois plus tard, déchiffrant avec peines les mots sur les pages souillées par la glace et l’eau, quand celles-ci n’avaient pas été arrachées. Il évoquait, une voix, puis une autre, plus lancinante, plus puissante et autoritaire.  

La première était son compagnon, il apparut en premier, par une nuit froide dans la tente où la chaleur du corps de Nessy ne lui suffisait pas à bien dormir. Il entendait le souffle du vent, claquer contre la toile de tente. Il devait pourtant faire un temps idéal pour cette exploration.  

Tu sais parfois, le hasard fait bien les choses...  

Il s’était redressé, cherchant dans la pénombre d’où venait cette voix, personne n’était rentré à moins qu’il ait finalement réussit à s’assoupir. Son cœur battait à tout rompre, mais il n’y avait personne, seulement sa solitude.  

Il repartit le lendemain, ayant déjà oublié l’épisode de la nuit. Terminant de refaire son paquetage et donnant une caresse à Nessy, il ne savait pas encore que ce serait la dernière fois qu’il ferait ces gestes.  

Car le ciel se couvrit rapidement, le froid, la neige, s’insinuait partout sur lui, il cherchait à se protégeait comme il pouvait, mais à quoi cela servait-il de lutter ?  

Continue d’avancer.

Cet ordre, cette voix, il n’avait pas le temps d’y réfléchir, chaque pas devenait plus dur que le précédent, il trébuchait plus qu’il marchait. Une énième chute, Nessy hurlant au désespoir de voir son maitre si faible et passant son museau sur sa tête pour l’aider à se relever.  

La neige est finalement plus chaude et confortable que tu ne pensais.  

Il sombra peu à peu, ses yeux ayant de plus en plus de mal à rester ouverts. Il eut seulement la force de tirer une fusée de détresse avant de fermer les yeux. Il fut recouvert de neige et c’est là qu’on trouvera plus tard l’ensemble de son équipement.  

 

On aurait dû t’y trouver aussi, s’il ne nous avait pas sauvé. Car tes yeux s’ouvrirent à nouveau, ne voyant qu’un mur blanc constitué devant toi. Depuis combien de temps tu es là ? Chut... Tu as entendu ? Relève ta tête !  

Et tu sortis de ta coquille de neige, Nessy sautillant de joie autour de toi alors que ton regard était fixé vers l'horizon, les yeux grands ouverts affrontant le vent et le froid sans ciller. Tu le vois n'est-ce pas ? Cette forme gigantesque, ses yeux jaunes transperçant le blizzard. Mais tu sembles le seul, car Nessy continue de te tourner autour. Tu poses ta main sur la tête de ta compagne, lui intimant de se calmer.  

Tu ne t’en rends pas compte sur le moment, mais, peu à peu, la sensation de froid disparait et c’est merveilleux. Tu sembles le seul à le voir, mais il est bien là n’est-ce pas ? Il a fait quelque chose. Il t’a choisi pour vivre. Tu en trembles, de ce mélange caractéristique de peur et d’adrénaline, comme quand une pierre roulait sous ton pied, te faisant perdre l’équilibre.  

Il t’invite au calme, tu l’écoutes avalant une grande goulée d’air pour évacuer ce qu’il restait d’air froid dans tes poumons. Il t’indique une direction, et tu y vas, c’est bien, c’est ce qu’il faut faire et au diable ce qu’il y a derrière. Quoi ? Tu cherches à résister à son appel ? Tu es un miraculé, tu viens de renaitre. Cette nouvelle vie, tu lui dois et tu commences déjà à oublier peu à peu le passé pour ne garder que ce mur blanc devant toi. C’est là que tu es né Henry, il n’y avait rien avant, il n’y aura rien après, pas vrai ? Alors, lâche ce journal, détruit le.  

"Oui... Tu as raison... Et, Nessy ?"  

Je ne sais pas quoi te dire, elle était là pour ta naissance, alors autant la garder avec nous.