☾ Issue d'une famille nombreuse et pauvre résidant dans des favelas, Karmen n'a pas grandit dans un cadre idyllique. Bercée par le machisme, l'alcoolémie et les descentes de flics, elle a une vision gangrenée de la famille, de l'affectif et de la justice. Deuxième d'une fratrie de six enfants dont elle est la fille la plus âgée, elle a pourtant toujours fait en sorte d'éduquer ses cadets pour leur éviter des méfaits. Principe du "faîtes ce que je dis, pas ce que je fais" par excellence, elle faisait des conneries et les grondait en parallèle s'ils avaient l'audace de prendre exemple.

☾ Son frère aîné et elle n'ont jamais été à l'école. Ce sont les deux membres de la fratrie qui ont mal tourné, plus par obligation qu'autre chose. Alejandro s'est mis à dealer très tôt. A voler, également. Entraînant sa sœur dans ses magouilles. L'argent gagné, ils l'utilisaient à bon escient. Cherchant à placer leurs trois frères cadets et sœur benjamine à l'école. Pour qu'ils puissent, eux au moins, se faire un avenir. Hélas, un jour lorsqu'elle avait 16 ans et lui 18, Alejandro a fait une erreur qui lui a coûtait cher. Pris la main dans le sac dans le vol d'une bijouterie, il a appuyé sur la détente et s'est fait coffrer pour homicide. A l'heure actuelle, Karmen n'a plus de nouvelles. Alej purgeant sans doute toujours sa peine, moisissant dans une cellule pourrie de la capitale.

☾ Il n'y avait plus d'entrée d'argent. Karmen n'était que revendeuse. C'était Alej qui faisait la came, pas elle. Il fallait qu'elle trouve une solution, rapidement, pour continuer à gagner de l'argent pour ses frères, sa sœur, sa famille. Alors, par profond dépit et amour des siens, elle s'est adonné à la prostitution. Seize ans, c'est trop tôt, trop jeune. En pleine période de développement, la jeune femme en tire aujourd'hui de sacrées répercussions sur ses rapports aux autres et à la sexualité. Répugnée par les hommes qu'elle n'aime que de faux semblants. Voyant son corps comme un pur produit marchand. Karmen a une vision purement utilitaire de la sexualité. Pour elle, cela n'a rien d'affectif ou de passionné. C'est un gagne pain, des minutes à perdre pour satisfaire un porc de riche qui pourrait être son père et gagner le jackpot à la clé. Un business tout ce qu'il y a de plus rentable et respectable. Après tout, n'est-ce pas là l'un des métiers les plus vieux de la civilisation ?

Fous le camp ! On ne veut pas de ton argent sale ici.
19 ans, découverte de la supercherie. Alibi des petits jobs cumulés anéantis. Quelle audace de la foutre à la porte parce qu'elle vend son corps alors que papá  l'a appris en se rendant au bordel où la niña propose ses services. Que monsieur trompe sa femme en voyant des prostituées, c'est ok. Mais que sa fille en soit une, c'est une hérésie ? Patriarcat nocif, quand tu nous tiens...
Les cadets pleurent, ne veulent pas perdre leur aînée comme le premier. Une étreinte tendre, des mots rassurants murmurés dans leur cou. Je ne serai jamais bien loin. Travaillez bien à l'école pour moi, d'accord ? Un large sourire leur est adressé, aussitôt perdu une fois la porte claquée. Dans ce monde, on se démène pour les gens qui à nos yeux en valent la peine. Et c'est ainsi que l'on nous remercie ? La vida es una perra.

☾ La jeune femme vit dans un petit appart miteux. Une chambre de bonne. Mais, ça lui suffit. Elle survit, continuant à glisser de l'argent discrètement à ses cadets. Contact maigrement gardé (car très limité) avec le plus âgé des 4. Ils s'en sortent, ont des bonnes notes... C'est tout ce qui importe. Elle cohabite avec un petit Cabriolaine. Œuf paumé, ramassé, qu'elle comptait graille en omelette avant de l'entendre craqueler. La voilà improvisée maman, mais, ça lui plaît finalement. Un peu de compagnie, ça ne fait pas de mal. Elle l'a nommé Djali. Comme dans Notre Dame de Stari. Un petit pokémon à sabots et une gitane solitaire... Ils forment vraiment bien la paire.

☾ Arrivée à Netovia il y a quelques mois seulement (un peu moins d'un an), après être monté à bord d'un bateau direction elle n'en savait strictement rien tout ce qu'elle voulait s'était échapper aux services de l'ordre après qu'on est cafté ses illégalités sur la voie publique en grimpant clandestinement comme une bad bitch de film sur un paquebot en hurlant "¡adiós pendejos!" depuis le pont alors qu'eux étaient comme des cons sur le quai. Résultat, elle se retrouve sur une île au climat bien loin de la chaleur de sa région. Donc, elle se plaint un peu. Mais bon. Au moins, elle peut repartir de zéro. (Et si vous pensez que cela signifie pour elle "aller dans le droit chemin" ou "se reconstruire sur des bonnes bases", vous vous mettez le doigt dans l'œil. Naaan ! Pourquoi faire compliquer quand on peut choisir la facilité ? Elle va juste pouvoir poichigeonner de nouveaux étrangers. ¡Esa es la idea!) Son seul regret est de ne plus avoir de contact possible avec ses seules raisons d'aimer : sa petite sœur et ses frères cadets.